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Dossier pédagogique- Aux Alizés

Le jeudi 28 avril 2022 aura lieu à 14h30 au Couvent des Jacobins de Rennes le concert scolaire Journal de Bord aux Alizés. Sensible à la préservation des océans et aux problématiques maritimes en lien avec son territoire, l’Orchestre National de Bretagne propose régulièrement dans sa programmation des concerts faisant écho à la mer. L’ensemble de ces concerts sont regroupés dans le projet maritime appelé “Projet Ponant”. Le programme Aux Alizés s’inscrit pleinement  dans ce projet. Les paysages sous-marins photographiés par Nicolas Floc’h rencontreront le son de la flûte traditionnelle japonaise du Concerto pour shakuhachi  du compositeur Dai Fujikura, commande de l’Orchestre National de Bretagne, qui sera présentée en création mondiale. Nous entendrons aussi l’Opus 27 de Félix Mendellsohn, Mer calme et voyage prospère. Vous trouverez dans cette page des éléments pour vous préparer à votre venue au concert.

Bon voyage musical et maritime!

Hugo Crognier

Enseignant conseiller relais

hugo.crognier@ac-rennes.fr

 

Dai Fujikura, le compositeur

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Né en 1977 à Osaka au Japon, Dai Fujikura quitte son pays natal pour le Royaume-Uni à 15 ans. Lauréat de nombreux prix, il a reçu de nombreuses commandes du Salzburg Festival, du Festival de Lucerne, des BBC Proms, du Banberg Symphony, du Chicago Symphony Orchestra, du Simon Bolivar Symphony Orchestra et bien d’autres. Il est compositeur en résidence à l’Orchestre Philharmonique de Nagoya depuis 2014, et l’a également été à l’Orchestre National d’Île-de-France en 2017-2018. Son premier opéra, Solaris, une commande conjointe du Théâtre des Champs-Elysées, de l’Opéra de Lausanne et de l’Opéra de Lille, a été créé à Paris en 2015, et a acquis depuis une réputation mondiale.

En 2017, Dai Fujikura reçoit le Lion d’argent à la Biennale de Venise, et la même année, il devient le Directeur artistique du festival Born Creative à Tokyo. En 2019, son Concerto pour Shamisen est créé au festival Mostly Mozart au Lincoln Center à New York, et a été depuis rejoué 9 fois par différents orchestres.

Les œuvres de Dai Fujikura ont été dirigées et interprétées par des artistes internationalement reconnus, tels que Pierre Boulez, Peter Eötvös, Jonathan Nott, Martyn Brabbins, Gustavo Dudamel, Christina Arming, Alexander Lebreich, Kazuki Yamada, Kazushi Ono, Viktoria Mullova, Jean-Guihen Queyras, Claire Chase, Akiko Suwanai et Yu Kosuge.

La flûte shakuhachi

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Le shakuhachi est une flûte japonaise, d’origine chinoise, à cinq trous (dont un à l’arrière), droite, creusée dans l’extrémité d’une grosse canne de bambou.  Elle permet de jouer sur une gamme pentatonique (à cinq sons) typique des musiques traditionnelles japonaises et chinoises.

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Les moines “Komoso” (littéralement “prêtres aux chapeaux de paille”) utilisaient le shakuhachi comme instrument de méditation

 

Origines mythologiques: la légende du moine Fuke

Personnage dont la vie est entourée de légendes, le moine Fuke allait dit-on par les chemins, récitant des textes en s’accompagnant d’une clochette. Il se serait évanoui dans les airs en ne laissant pour seule trace que sa résonance, que des moines auraient tentée de reproduire sur la flûte shakuhachi. Selon la tradition, c’est le religieux Kakushin (1206-1298) qui en propagea l’enseignement à travers les trois pièces fondamentales du répertoire : Kyorei, « la cloche du vide », qui décrit l’éveil spirituel du Bouddha à la vérité sous l’arbre de la méditation ; Mukai, « la mer de brume », image du chemin difficile pour atteindre l’illumination de la vérité ; et Kokû, « vacuité », état de l’être ayant atteint l’illumination.

 

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Le moine Pu Hua (Fuke) représenté par John Singer

Origines historiques

L’ancêtre du shakuhachi japonais est un instrument similaire importé de Chine avec l’ensemble gagaku (musique de cour) au cours de la période Nara (710-784). Il existe plusieurs théories sur l’origine du mot shakuhachi. Selon le “Tosho”, un recueil de biographies chinois datant du début du septième siècle, un homme nommé Rosai façonna une flûte de pan à douze tuyaux correspondant au système chinois des douze hauteurs de son fixes. Le tuyau produisant le son grave , connu sous le nom de “Kosho” (correspondant à un “Ichikotsu ” japonais ou au ré occidental), mesurait un shaku (unité de mesure) et huit (hachi) dixièmes (sun) de shaku – c’est-à-dire, environ 54,5 centimètres. Le nom de l’instrument, shakuhachi, proviendrait donc de ses dimensions.

Le Concerto pour Shakuhachi de Dai Fujikura

Ce concerto sera présenté en création mondiale au Couvent des Jacobins à Rennes le 28 avril 2022. Il n’existe donc aucun enregistrement à ce jour. Le conducteur (partition du chef d’orchestre) présente en premières pages  l’instrumentation de ce concerto:

  • Bois: 2 flûtes, couplées par des piccolos (petites flûtes plus aigues), 2 hautbois, 2 clarinettes en si bémol, deux bassons (dont un couplant avec un contrebasson, plus grave).
  • Cuivres: 2 cors en Fa, 2 trompettes en si bémol (nécessitant parfois l’usage de sourdine)
  • Percussions: 1 vibraphone. A noter, pas de timbales.
  • Cordes: violons I et II, altos, violoncelles et contrebasses.
  • Instrument soliste: SHAKUHACHI

 

“Je n’ai jamais vraiment rencontré de musique ou d’instruments traditionnels japonais dans ma jeunesse au Japon… Il y a environ sept ans, on a commencé à me demander assez souvent d’écrire pour des instruments traditionnels japonais. En fait, ces instruments très anciens sont donc plutôt nouveaux pour moi! Mon morceau solo de shakuhachi Korkoroko a été écrit pour Dozan Fujiwara, probablement le joueur de shakuhachi le plus connu aujourd’hui. Après la création de ce morceau, j’ai su que je voulais le développer et en faire un concerto. J’ai donc été ravi d’avoir l’opportunité de le faire, grâce à la commande de l’Orchestre National de Bretagne”. Dai Fujikura

 

“Outre la singularité et les traditions ancestrales du shakuhachi, je me suis également inspiré des photographies sous-marines de Nicolas Floc’h. J’ai toujours été fasciné par le monde sous-marin, et ses photos en noir et blanc (prises du point de vue d’un océanographe et d’un photographe) ont capturé un monde que je ne connaissais pas auparavant. C’est comme s’il y avait une brise d’air bouillonnant dans les profondeurs de l’océan, comme si la surface de l’eau était le ciel, comme si le monde était à l’envers…”

Nicolas Floc'h, plasticien, photographe

Né en 1970 à Rennes, Nicolas Floc’h vit et travaille à Paris en même temps qu’il enseigne à l’EESAB-site de Rennes.
Depuis bientôt 30 ans, il investit de nombreux champs artistiques. Ses installations, photographies, sculptures ou encore performances questionnent une époque de transition, où les flux, la disparition et la régénération tiennent une place essentielle.

 

Ses recherches sur la représentation de l’environnement sous-marin ont abouti à plusieurs séries de photographies, dont Structures productives, récifs artificiels, 2011-2017 .  En noir et blanc, elle montre des récifs artificiels japonais et européens immergés depuis plusieurs années. Inaccessibles car se situant généralement en zones protégées, interdites à la plongée, autorisées pour les seuls scientifiques, fabricants de récifs ou pêcheurs. Chaque plongée nécessite des permis spécifiques. Une partie importante de ceux-ci se trouve dans la zone des 20 à 30 m de profondeur. Une fois immergés, les récifs artificiels se transforment lentement et deviennent des architectures vivantes…

 

 

Structure productive, récif artificiel Cubes, -27m, Golfe-Juan

 

“C’est à l’occasion de l’expédition sur la goélette Tara Expéditions au Japon en 2017 que mon protocole artistique entre en résonance avec un protocole scientifique autour de l’observation de l’acidification des océans documentés par les scientifiques par le biais de prélèvements et de photographies appelées quadra (images sur 1m2). La zone acide est due à une activité volcanique et à l’émanation de CO2 faisant de cette zone un laboratoire , la préfiguration d’un océan du futur possible. Mes prises de vues vont alors entrer dans ce protocole scientifique pour compléter cette comparaison par le biais de mon sujet de départ, la représentation du paysage.”

Conférence - Les mondes sonores de l'océan

 

Comment musique et océan peuvent-ils se rencontrer ? Comment un compositeur s’inspire-t-il de la mer et collabore-t-il avec un photographe marin ? Qu’est-ce que l’éco-acoustique et que nous disent les sons de l’océan sur le devenir de cet écosystème ? Comment créer entre mélodies et cris d’alarme du vivant ?

Ces questions passionnantes seront discutées le 28/05 à 18h au Couvent des Jacobins lors d’une conférence qui réunira le compositeur Dai Fujikura et le photographe Nicolas Floc’h, en compagnie de Emmanuel Reibel (musicologue, auteur de La Nature et la Musique, pianiste et conférencier), Maëlle Torterotot (bio-acousticienne, ingénieure de recherche à l’ENSTA Bretagne et violoncelliste), et Marie Hédin Christophe (Directrice Générale du journal La Lettre du Musicien).

Felix Mendelssohn- Bartholdy (1809-1847)

 

Felix Mendelssohn naît le 3 février 1809 à Hambourg. Il est le deuxième d’une famille de quatre enfants. Lui et sa sœur Fanny montrent un génie précoce pour la musique. Fanny Mendelssohn deviendra une des rares femmes compositrices de renom au XIXème siècle (avec entre autres Clara Schumann, Louise Farrenc ou Hélène de Montgeroult). Ci-dessous Fanny et Félix Mendelssohn.

 

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Voici un lien vers la page consacrée à la vie de Félix Mendelssohn (Eduthèque – Philharmonie de Paris) :

https://pad.philharmoniedeparis.fr/0038902-biographie-de-felix-mendelssohn-bartholdy.aspx

Le poète et le musicien

 

En 1819 les parents de Félix et de Fanny engagent Carl Friedrich Zelter comme professeur de musique pour leurs enfants.  Zelter est le conseiller musical du poète allemand Johann Wolfgang von Goethe. Il décide d’emmener Félix (alors âgé de 12 ans) avec lui lors d’un voyage à Weimar en 1821 pour lui présenter le poète (alors âgé de  72 ans).

 

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Felix Mendelssohn donnant un concert chez Goethe, en présence de Zelter. Gravure sur bois d’après le tableau de Woldemar Friedrich

 

Dans des lettres du 6 et du 10 novembre 1821 adressées à ses parents, Félix Mendelssohn écrit:

« J’ai joué devant Goethe des fugues de Bach et des improvisations pendant plus de deux heures, raconte la garçon à ses parents. […] Je fais beaucoup plus de musique ici qu’à la maison. Je joue généralement quatre heures de suite, parfois six, et même huit. Chaque jour, après dîner, Goethe ouvre le piano en disant: «Je ne t’ai pas encore entendu aujourd’hui. Fais-moi un peu de bruit. »

Subjugué par le génie du jeune Mendelssohn, qu’il compare à Mozart, le poète septuagénaire l’invite à revenir au plus vite.
Vœu exaucé l’année suivante quand la famille Mendelssohn fait halte à Weimar sur le chemin de retour de leur premier séjour suisse. En 1825, lors d’une nouvelle visite à Weimar, Félix dédie son Quatuor pour piano et cordes en si mineur op. 3 à Goethe, en signe de l’amitié.

Jusqu’à la mort de Goethe, les deux artistes se rencontreront régulièrement à Weimar.  Leur ultime rencontre date de 1830, alors que Félix Mendelssohn, maintenant jeune adulte, est sur le chemin de l’Italie. Plusieurs lettres datent de ce séjour, dont celle-ci, à ses parents, datée du 25 mai 1830:

” Goethe est pour moi si bon, si affectueux que je ne sais comment l’en remercier […] Avant midi, je dois, pendant une petite heure, lui jouer sur le piano des morceaux de divers grands compositeurs, par ordre chronologique, et lui expliquer comment ils ont fait progresser l’art. Pendant ce temps-là, il se tient assis dans un coin, sombre comme un Jupiter tonnant, et ses yeux lancent des éclairs.”

Mer calme et heureux voyage: des poèmes de Goethe...

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Goethe représenté par Joseph Karl Stieler en 1828

 

Goethe écrit les deux poèmes Meerestille et Gluckliche Fahrt comme des textes indépendants en 1795. Ils présentent des titres différents , mais sont pourtant déjà considérés comme couplés. Schiller, autre poète allemand, les assemble dans son “Musen- Almanach fur das Jahr 1796” (sorte d’annuaire littéraire populaire en Allemagne à cette époque), et Beethoven, en 1814-1815, les intègre tous deux dans la forme de sa courte Cantate pour chœurs et orchestre (Op.112).  

Le premier des poèmes, Meeresstille, décrit un bateau immobile sur une mer calme et sans vent. Dans le second, Glückliche Fahrt, le vent se lève et gonfle les voiles, faisant avancer le bateau de plus de plus vite…

Meeresstille

Tiefe Stille herrscht im Wasser,
Ohne Regung ruht das Meer,
Und bekümmert sieht der Schiffer
Glatte Fläche rings umher,
Keine Luft von keiner Seite!
Todesstille fürchterlich!
In der ungeheuern Weite
Reget keine Welle sich.

Mer calme

Un silence profond règne sur l’eau,
La mer repose immobile,
Et le marin, soucieux, voit
Autour de lui la surface inerte.
Aucun souffle d’aucun côté!
Un effroyable silence de mort!
Au plus immense lointain,
Aucune vague ne roule.

Glückliche Fahrt

Die Nebel zerreissen,
Der Himmel ist helle
Und Aeolus löset
Das ängstliche Band.
Es säuseln die Winde,
Es rührt sich der Schiffer.
Geschwinde! Geschwinde!
Es teilt sich die Welle,
Es naht sich die Ferne;
Schon seh’ ich das Land!

Heureux voyage

Les brumes se déchirent, le ciel est clair
Et Eole desserre leur lien délicat.
Les vents mugissent,
Le marin s’agite.
Vite ! Vite !
Les vagues se brisent,
Le lointain approche.
Déjà, je vois la terre.
Vite! Vite!
Je vois déjà la terre.

... à la musique de Félix Mendelssohn

 

Contexte de composition

Felix Mendelssohn compose l’ouverture Meeresstille und glückliche Fahrt, Opus 27  (Mer calme et heureux voyage) en 1828. Cette œuvre est mentionnée pour la première fois à la fin d’une longue lettre écrite par le compositeur au librettiste Karl Klingemann le 5 février 1828:

“Je souhaite pour ma part faire mes preuves en écrivant une grande ouverture sur les poèmes de Goethe Meeresstille und gluckliche Fahrt. J’ai ce travail en tête, les vagues épaisses seront représentées par les contrebassons.”

Fanny écrit également à Klingemann le 18 juin de la même année et donne quelques précisions…

“Félix écrit une grande pièce instrumentale sur des poèmes de Goethe. Il a voulu éviter une ouverture avec introduction, et l’ensemble se compose de deux tableaux séparés.”

L’œuvre est créée en privé, dans la maison des Mendelssohn à Berlin le 7 septembre 1828, sous la direction du compositeur. Dans l’assemblée étaient notamment présents Johann Droysen (historien prussien), Eduard Devrient (acteur et chanteur d’opéra allemand), ainsi que Zelter, le professeur de Mendelssohn. La pièce aurait été jouée plusieurs fois.

Une œuvre révisée en 1834

Il existe deux versions de Mer calme et heureux voyage. En 1832, l’œuvre est jouée lors d’une série de trois concerts à Berlin.  Chaque concert présente une des trois ouvertures écrites par Mendelssohn: Le Songe d’une nuit d’été (Op.21, 1827), Le Hébrides ou La grotte de Fingal (Op.26, 1830-1832) et Mer calme et heureux voyage. Cela suggère à Mendelssohn de considérer ces trois ouvertures comme une seul et même entité pour publication, comme en témoigne sa correspondance avec son éditeur Breitkopf & Hartel. L’unité tient dans les liens tissés entre musique, peinture et poésie (Shakespeare, Ossian et Goethe). Le 14 mars 1834, Mendelssohn envoie la partition révisée à son éditeur, s’excuse pour le retard, et précise le titre de la publication : Trois Concerts d’Ouvertures.

C’est la version de 1834 que vous entendrez le 28 avril 2022 au Couvent des Jacobins sous la direction de Grant Llewellyn.

Au cœur de l'œuvre- Mer calme

 

Une musique descriptive

Le point de départ de la composition de Félix Mendelssohn est donc extra-musical, en l’occurrence littéraire. Quels moyens musicaux le compositeur utilise-t-il pour illustrer les poèmes de Goethe? Comment exprimer musicalement le calme de la mer étale, ou bien le vent qui se lève et gonfle les voiles?

Les audios des guides d’écoute sont extraits de la version du London Symphony Orchestra dirigé en 2000 par Claudio Abbado (disque publié chez Deutsche Grammophon).

 

Etirer le temps

La première partie, Mer calme, est un mouvement lent (Adagio).  Dès les premières mesures, le temps est comme suspendu,  les durées des notes s’étirent pour dépeindre l’étendue infinie de l’eau…

 

Dans l’extrait ci-dessus, les violoncelles tiennent une note pédale (un ré octavié) tandis que les masses sonores se déplacent lentement dans les parties supérieures. On retrouve ce même procédé un peu plus loin, les premiers et seconds violons tiennent une note (encore un ré, encore octavié) qui semble ne jamais finir, ne jamais se résoudre…

 

Elargir l’espace

“Autour de lui, la surface inerte (…) Au plus immense lointain”…

Les deux flûtes dès la 8ème mesure présentent des lignes qui s’élargissent. Elles débutent sur la même note (unisson sur la, consonnant). La première flûte va rester sur cette note tandis que la deuxième descend, d’abord sur sol (intervalle de seconde, frottement, légèrement dissonant), et enfin sur fa  (intervalle de tierce, consonnant).

 

 

Quelques mesures plus tard, des voix dispersées s’imitent, sur un rythme iambique (brève-longue). Les instruments apparaissent successivement dans l’espace sonore, aux cordes et clarinette avant de se rassembler en de majestueux accords, donnant à entendre un horizon, un “immense lointain”…

 

Le tableau porte en lui une part d’intranquillité. La mer est calme et paisible, certes, mais sans vent, le voilier est condamné à une immobilité désespérante. Le marin est soucieux de ne pas voir le vent se lever. Goethe fait ainsi allusion à cet “effroyable silence de mort”… Finalement, une brise se lève, symbolisée par un solo de flûte qui annonce le voyage heureux (Gluckliche Fahrt).

 

Il faut attendre ces toutes dernières mesures pour entendre une variation d’intensité significative. Toute cette première partie a en effet évolué dans une nuance piano ou pianissimo constante. Le crescendo et fortissimo final annoncent la seconde partie, dont les nuances présentent nettement plus de relief…

 

 

Au cœur de l'œuvre- Heureux voyage

 

L’Allegro vivace qui suit est destiné à rendre les impressions du voyage en mer sous un beau ciel, au souffle des vents favorables.

Un embrasement orchestral

Ce mouvement s’ouvre par des traits de cordes et de vents qui alternent dans un grand crescendo. L’orchestre tout entier se met en mouvement, comme les voiles du vaisseau se gonflent de vent…

 

“Les vagues se brisent, le lointain approche”, dit Goethe dans son poème… Notons que nous pouvons reconnaître visuellement sur le conducteur (partition du chef d’orchestre) l’ondulation des vagues, avec ces mouvements mélodiques ascendants et descendants caractéristiques…

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Un thème héroïque

S’ensuit bientôt une mélodie héroïque, beethovénienne, fortissimo et en tutti d’orchestre…

 

L’arrivée au port

La terre est en vue, “Déjà, je vois la terre. Vite! Vite! Je vois déjà la terre”! L’issue heureuse est annoncée par un roulement de timbales, comme des coups de canons!

 

 

Enfin, l’arrivée au port est célébrée par une fanfare de cuivres triomphants qui petit à petit se propage à l’orchestre tout entier. Les derniers accords vont diminuant, vers le pianissimo, c’est la fin du voyage…

Bibliographie- Webographie- Crédits

 

Bibliographie:

BASTIANELLI Jérôme, Félix Mendelssohn, Actes sud Classica, 2008

FRANCOIS-SAPPEY Brigitte, Félix Mendelssohn, la lumière de son temps, Fayard, 2008

SCHNEIDER Corinne, La musique des voyages, Fayard, 2019

Webographie:

https://pad.philharmoniedeparis.fr/0038902-biographie-de-felix-mendelssohn-bartholdy.aspx

https://pad.philharmoniedeparis.fr/musiques-japon-fuke-shakuhachi.aspx

http://www.chikudo-bamboo-flutes.com/

https://www.nicolasfloch.net/

Crédit photo:

© Albert Dutertre, à bord du Mongolia, entre Honolulu et Yokohama, 13 décembre 1908. Inv.D734 © Département des Hauts-de-Seine / Musée départemental Albert-Kahn

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