Le compositeur
Pour tous les éléments biographiques généraux sur Antonin Dvorak, rendez-vous sur la page du site de la Philharmonie de Paris: https://pad.philharmoniedeparis.fr/0035605-biographie-antonin-dvorak.aspx# ou bien encore, pour plus de précision, Guy Erismann a écrit un livre biographique chez Fayard.
Contexte de composition
Antonin Dvorak se voit proposer, dans un télégramme daté du 5 juin 1891, le poste prestigieux de directeur du Conservatoire national de musique de New-York.
«Voulez-vous accepter le poste de directeur du Conservatoire national de musique de New-York à partir d’octobre 1892? Ainsi que la direction de six concerts? Signé Jeannette Thurber»
Il hésite, car depuis peu il enseigne au Conservatoire de Prague (composition, harmonie, contrepoint) et jouit d’une confortable situation. Il se tourne alors vers ses amis, negocie avec Jeannette Thurber via son avocat, et finit par accepter la proposition.
Le Concerto pour violoncelle et orchestre en Si mineur Op.104 est donc composé à New- York entre le 8 novembre 1894 et le 9 février 1895. Ce concerto est la dernière grande oeuvre écrite par le compositeur aux Etats-Unis. Il existe avant celui -ci une partition d’un premier concerto pour violoncelle datant de 1865, mais il ne fut jamais orchestré par le compositeur…
Hanousch Wihan, membre du quatuor de Bohème et l’un des meilleurs violoncellistes tchèques de son temps, avait accompagné Dvorak (alors au piano) et Ferdinand Lachner (au violon) lors de la «tournée d’adieu du compositeur à sa patrie» (quarante concerts du Trio Dumki en 1892, juste avant son départ vers New-York). C’est ce même Hanousch Wihan qui sollicite le compositeur pour l’écriture d’un concerto pour violoncelle… Dvorak hésite et finit par se décider en écoutant le concerto de son collègue américain au conservatoire, Victor Herbert.
Le concerto ne fut créé à Londres le 19 mars 1896 qu’après le retour de Dvorak en Europe (alors vieilli, fatigué). S’il y a un délai de presque un an entre l’achèvement de la composition et sa création, c’est notamment que Dvorak se brouille avec son interprète Hanousch Wihan, qui, en bon virtuose, souhaite ajouter une cadence au dernier mouvement. Le compositeur s’y oppose et c’est en ces termes qu’il s’adresse à son éditeur:
«Des différences d’opinion nous opposent, mon ami Wihan et moi, en plusieurs endroits. Certains passages me déplaisent dans ses suggestions et il me faut insister pour que la pièce soit imprimée telle que je l’ai moi-même écrite… Je ne vous confierai la tâche que si vous me promettez de n’autoriser personne, pas même notre ami Wihan, à y apporter le moindre changement à mon insu et sans mon consentement, y compris la cadence qu’il a ajoutée au dernier mouvement : celle-ci ne doit figurer ni dans la partition, ni dans l’arrangement pour piano. J’ai d’ores et déjà informé Wihan qu’il n’était absolument pas question de l’ajouter. Le finale progresse, diminuendo, tel un soupir, dans un rappel des deux premiers mouvements. Le solo s’évanouit, pianissimo, pour regagner ensuite son ampleur, tandis que l’orchestre reprend les deux dernières mesures et que la pièce s’achève dans le tumulte. C’est là mon idée et je ne désire pas m’en écarter. » – Dvorak, lettre à son éditeur Simrock
Wihan prend mal les remarques de Dvorak, et la Société philharmonique de Londres prend acte de ce différend en sollicitant un autre soliste de renom, le violoncelliste Leo Stern. Apprenant cela, Dvorak furieux adresse une lettre de protestation au secrétaire de l’orchestre:
«J’ai le regret de vous informer que je ne puis diriger l’exécution du Concerto pour violoncelle, ayant promis à mon ami Wihan que ce serait lui qui le jouerait. Si vous inscrivez ce concerto au programme, sachez que je ne viendrai pas mais serais toutefois heureux de venir une autre fois»
Cette question reste en suspens, et au final le compositeur se fait à l’idée que ce sera bien Leo Stern qui assurera la création de son concerto, et l’accueille ainsi à Londres en février 1896 pour régler des problèmes d’exécution, avant sa création, le 19 mars 1896, au Queen’s Hall.