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Viviane Hagner 01 - crédit Timm Kölln

Dossier pédagogique – Inspiration Bach #2

 

La saison des concerts scolaires de l’Orchestre National de Bretagne se poursuit, avec cette fois le programme Inspiration Bach #2, le jeudi 14 décembre 2023 à l’Opéra de Rennes. Nous aurons le plaisir d’entendre, en miroir, des extraits de deux œuvres: le Concerto pour violon en ré mineur de Félix Mendelssohn, et le Concerto Brandebourgeois n°3 en Sol Majeur (BWV 1048) de Jean-Sébastien Bach. Viviane Hagner sera à la direction musicale et au violon.

Vous trouverez sur cette page des éléments pour vous préparer avec vos élèves à votre venue au concert. Repères biographiques, contexte de composition des œuvres, guides d’écoutes, pistes pédagogiques…

N’hésitez pas à me contacter pour toute question ou suggestion…

Bonne lecture, bonne écoute, bon concert!

Hugo Crognier

Enseignant conseiller relais ONB

hugo.crognier@ac-rennes.fr

Jean-Sébastien Bach (1685-1750)

Jean- Sébastien Bach est un compositeur majeur dans l’histoire de la musique. Il nait en Allemagne dans une famille de musiciens à Eisenach (dans le Duché de Saxe-Eisenach) le 21 mars 1685. Il devient orphelin de père et mère très tôt dans sa vie (à l’âge de dix ans) et il est accueilli à Ohrdruf par son grand frère Johann Christoph Bach. Durant la première partie de sa vie, il copie  inlassablement toutes les partitions qu’il trouve. Il joue de plusieurs instruments (violon, alto, clavecin, orgue)…  A quatorze ans, il se retrouve en classe en classe avec des jeunes gens de quatre ans plus âgés que lui. La musique tient une large place dans son emploi du temps : l’école y consacre quatre à cinq heures par semaine.

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Chez son frère, les revenus du foyer sont largement insuffisants. Bach doit partir. Il parcourt 350 kilomètres à pied vers le nord de l’Allemagne avec un camarade. Il entre dans le chœur de Lunebourg et y poursuivre sa scolarité. Il y reste trois années, puis passe de ville en ville. Son talent est reconnu partout où il passe, il travaille pour des princes, des églises. Sa réputation de brillant organiste grandit en Allemagne. Le Conseil d’Arnstadt l’engage à dix-huit ans sans même entendre les autres candidats, après qu’il ait fait une démonstration époustouflante sur le nouvel orgue.

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Les biographies existantes sur Jean Sébastien Bach s’organisent autour de quelques scènes retenues comme emblématiques :

– Le vol, à la fin de son adolescence, d’un recueil de pièces de clavecin considérées par son frère ainé comme au dessus de ses forces, et qu’il passe ses nuits à recopier «au clair de lune», se doit d’illustrer sa précocité, sa soif de connaissances, et sa hauteur de vue qui lui fait enfreindre les lois communes au bénéfice des exigences de son art.

– La permission de quatre semaines, obtenue en 1705 auprès de son employeur à Arnstadt, et qu’il porte de son propre chef à 4 mois, pour aller à pied à Lubeck, distante de quelques 400 kilomètres, écouter le grand organiste Buxtehude.

– Les divers récitals et duels : Bach versus Louis Marchand, à Dresde en 1717, où le rival français se serait enfui pour éviter une confrontation inégale, et Hambourg, en 1720, où il impressionne Reinken qui, en l’adoubant, le proclame digne successeur de la grande école germanique d’organistes improvisateurs, autant de manifestations de sa science inégalée de la musique, faisant de lui LE compositeur par excellence.

– La visite au Roi Frédéric de Prusse dans sa résidence de Postdam (près de Berlin), enfin, nourrit la légende selon laquelle le souverain aurait soumis un thème de son cru à la sagacité d’improvisateur du vieux compositeur, donnant naissance à la magistrale Offrande musicale.

Ces épisodes magnifiant la grandeur de Bach sont extraits du fil d’une existence bien réglée, placée sous le signe de la piété, de l’humilité et de l’artisanat (assez étrangers au concept de génie développé ultérieurement par les romantiques).

Concerto brandebourgeois n°3 BWV 1048

Les Concertos brandebourgeois BWV 1046-1051

Les Six Concerts avec plusieurs instruments (que le musicologue Spitta baptise Brandebourgeois en 1880) sont dédiés au Margrave de Brandebourg, Marquis du Land de Berlin et oncle du Roi de Prusse, rencontré en 1718 à l’occasion de la commande d’un nouveau clavecin pour la cour de Köthen. Recevant les concertos fin mars 1721, il ne semble pas s’émouvoir que son orchestre de six musiciens ne puisse les jouer (les n°5 et 6 exceptés) en raison de son effectif insuffisant. Bach anticipe tout reproche en rappelant qu’il lui avait été demandé deux ans auparavant quelques pièces de [sa] composition, sans précision.

Il est probable qu’il ait regroupé ces concertos pour obtenir un nouveau poste par l’entremise du Margrave : il désire en effet mettre un terme à ses fonctions à la cour de Köthen. La dédicace en français – la langue parlée à la cour de Berlin – est très flatteuse. On ignore si la partition est jouée par le Margrave et ses musiciens car elle ne comporte aucune annotation, et Bach n’est ni remercié, ni rétribué. L’œuvre est classée parmi des dizaines d’autres concertos de divers maîtres et pour divers instruments.

 

 

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Le Concerto brandebourgeois n°3 en Sol Majeur , BWV 1048

Ce concerto présente l’effectif instrumental suivant: 3 violons, 3 altos, 3 violoncelles et la basse continue. Les cordes sont donc divisées en trois groupes qui dialoguent.

“Le premier mouvement du troisième Concerto Brandebourgeois en sol majeur (BWV 1048) représente peut-être le chef-d’œuvre de l’art du motif. Cette œuvre s’écarte le plus de la forme typique du Concerto grosso; elle ne connaît aucun soliste. Bach n’y engage que des instruments à cordes et il répartit cet ensemble homogène en groupes de trois instruments: 3 violons, 3 altos et 3 violoncelles.”

Peter Wackernagel

Les extraits audio des guides d’écourte proviennent d’une des versions de référence de la discographie des Brandebourgeois: Café Zimmermann chez Alpha Productions en 2003.

 

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Focus #1 - Premier mouvement

 

Le thème principal

Un thème joyeux irrigue le premier mouvement de ce concerto, lancé par une petite anacrouse, qui à cette époque est très fréquente dans l’écriture musicale de Jean-Sébastien Bach, comme une “obsession rythmique” (Gilles Cantagrel in J.S Bach, L’œuvre instrumentale, p.377, Buchet-Chastel, 2017).

 

Une organisation démocratique

Entre violons, altos et violoncelles, les fulgurances mélodiques en doubles croches se déploient démocratiquement. Aucun instrument n’est supérieur aux autres, relégué au simple rôle d’accompagnement ou de faire valoir. Comme dans une course de relais, les instruments se passent le témoin, et chacun est mis en avant, à tour de rôle. Le modèle convoqué ici est le concerto vénitien à plusieurs chœurs (on pense à Antonio Vivaldi).

L’exemple qui suit (mesures 31 à 37)  illustre bien comment la mélodie principale, en doubles croches, passe des violons, aux altos, et enfin aux violoncelles…

 

Des contrastes dynamiques

L’écriture musicale procède par contrastes énergiques entre les groupes musicaux avec des effets de masse. L’exemple qui suit (mesures 67 à 73) débute à la nuance piano et soudainement passe à la nuance forte. Le petit montage sur le logiciel Audacity permet de visualiser ce changement d’intensité:

 

 

Ce premier mouvement a été remanié par Bach en 1729 – avec des hautbois, des bassons et des trompettes – pour devenir la Sinfonia de sa cantate liturgique BWV 174 (“Ich liebe den Höchsten von ganzem Gemüte“).

L'énigme du second mouvement

 

Il n’y a pas à proprement parler de deuxième mouvement dans ce concerto. Bach note seulement deux accords accompagnés de l’indication Adagio (qui désigne un tempo lent). “Modulant au relatif mineur et restant en suspens, ces deux accords séparent (ou réunissent) les deux volets de l’œuvre” , comme l’indique Gilles Cantagrel qui avance trois hypothèses:

1/ Telle est la volonté du compositeur d’enchaîner ainsi les deux mouvements.

2/ Le compositeur laisse la place à un mouvement improvisé (par exemple une cadence qui se terminerait pas ces deux accords).

3/ La forme demeure ouverte pour interpoler un autre morceau au choix des exécutants.

Focus #2 - Troisième mouvement

 

Le troisième et dernier mouvement est une gigue en 12/8. A l’origine, il s’agit d’une danse d’origine anglaise ou irlandaise. En vogue en Angleterre, elle se répand très vite en France et en Italie. A l’époque baroque de Jean-Sébastien Bach, la gigue est très souvent la pièce finale d’une suite instrumentale, c’est le cas ici. Chef d’œuvre de virtuosité, ce second Allegro s’organise en deux parties avec reprises.

 

Felix Mendelssohn- Bartholdy (1809-1847)

 

Felix Mendelssohn naît le 3 février 1809 à Hambourg. Il est le deuxième d’une famille de quatre enfants. Lui et sa sœur Fanny montrent un génie précoce pour la musique. Fanny Mendelssohn deviendra une des rares femmes compositrices de renom au XIXème siècle (avec entre autres Clara Schumann, Louise Farrenc ou Hélène de Montgeroult). Ci-dessous Fanny et Félix Mendelssohn.

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Voici un lien vers la page consacrée à la vie de Félix Mendelssohn (Eduthèque – Philharmonie de Paris) :

https://pad.philharmoniedeparis.fr/0038902-biographie-de-felix-mendelssohn-bartholdy.aspx

 

Le poète et le musicien

En 1819 les parents de Félix et de Fanny engagent Carl Friedrich Zelter comme professeur de musique pour leurs enfants.  Zelter est le conseiller musical du poète allemand Johann Wolfgang von Goethe. Il décide d’emmener Félix (alors âgé de 12 ans) avec lui lors d’un voyage à Weimar en 1821 pour lui présenter le poète (alors âgé de  72 ans).

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Felix Mendelssohn donnant un concert chez Goethe, en présence de Zelter. Gravure sur bois d’après le tableau de Woldemar Friedrich

 

Dans des lettres du 6 et du 10 novembre 1821 adressées à ses parents, Félix Mendelssohn écrit:

« J’ai joué devant Goethe des fugues de Bach et des improvisations pendant plus de deux heures, raconte la garçon à ses parents. […] Je fais beaucoup plus de musique ici qu’à la maison. Je joue généralement quatre heures de suite, parfois six, et même huit. Chaque jour, après dîner, Goethe ouvre le piano en disant: «Je ne t’ai pas encore entendu aujourd’hui. Fais-moi un peu de bruit. »

Subjugué par le génie du jeune Mendelssohn, qu’il compare à Mozart, le poète septuagénaire l’invite à revenir au plus vite.
Vœu exaucé l’année suivante quand la famille Mendelssohn fait halte à Weimar sur le chemin de retour de leur premier séjour suisse. En 1825, lors d’une nouvelle visite à Weimar, Félix dédie son Quatuor pour piano et cordes en si mineur op. 3 à Goethe, en signe de l’amitié.

Jusqu’à la mort de Goethe, les deux artistes se rencontreront régulièrement à Weimar.  Leur ultime rencontre date de 1830, alors que Félix Mendelssohn, maintenant jeune adulte, est sur le chemin de l’Italie. Plusieurs lettres datent de ce séjour, dont celle-ci, à ses parents, datée du 25 mai 1830:

” Goethe est pour moi si bon, si affectueux que je ne sais comment l’en remercier […] Avant midi, je dois, pendant une petite heure, lui jouer sur le piano des morceaux de divers grands compositeurs, par ordre chronologique, et lui expliquer comment ils ont fait progresser l’art. Pendant ce temps-là, il se tient assis dans un coin, sombre comme un Jupiter tonnant, et ses yeux lancent des éclairs.”

Concerto pour violon et orchestre en ré mineur

 

Lorsque Félix Mendelssohn termine l’écriture de son Concerto pour violon en ré mineur,  en 1822, il est alors âgé de 13 ans! Il composera bien plus tard en 1844-45 le Concerto pour violon en Mi mineur op.64 qui est LE concerto pour violon de Mendelssohn de loin le plus connu et le plus joué. Sans les efforts, du violoniste Yehudi Menuhin, qui aimait beaucoup cette œuvre (au point de l’éditer en 1952), sans doute ces pages seraient elles tombées dans l’oubli…

Instrumentation: Violon solo + orchestre à cordes (Violons I, Violons II, Altos et Violoncelles).

Les extraits audio choisis sont extraits du disque publié chez le label CPO – Lena Neudauer / Matthias Kirschnereit avec le Sudwestdeutsches Kammerorchester Pforzheim – 2018).

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Focus #1 - Allegro molto & Andante

A/ Allegro

Le premier mouvement de ce concerto s’ouvre par une introduction, à l’orchestre à cordes seul (sans le soliste). Le début est fracassant, une phrase à l’unisson, en homorythmie, qui installe d’emblée la tonalité de ré mineur. La nuance est forte, le caractère résolu, dramatique, presque menaçant…

Puisque le programme s’intitule Inspiration Bach, nous remarquerons ici ou là des similitudes avec le Concerto brandebourgeois n°3 précédemment écouté: des contrastes dynamiques marqués (dès les premières mesures de forte à piano), mais aussi des lignes mélodiques qui se propagent parmi les différents instruments à cordes, qui peuvent être entendues comme des questions / réponses, mais surtout qui forment un tout cohérent, équilibré, sans qu’aucun groupe d’instrumentistes ne prennent vraiment le dessus sur les autres…

 

Ce concerto de Mendelssohn, à la différence de celui de J.S Bach, met clairement en valeur un instrument soliste: le violon.  Il entre à la mesure 46, et débute par le thème principal, chantant, lyrique et virtuose. L’accompagnement par l’orchestre à cordes rappelle le motif initial, comme une réminiscence…

 

B/ Andante

Le second mouvement de ce concerto est de tempo lent. un Andante en Ré Majeur. Le caractère est paisible et lumineux. Comme en témoigne le thème principal, ci-dessous, l’écriture musicale répond aux exigences de la tradition classique: clarté et équilibre. On pense immanquablement à Mozart…

Focus #2 - Troisième mouvement - Allegro

 

L’Allegro final semble nous inviter à la danse! Le thème principal, con spirito, est sans doute inspiré par une mélodie populaire de l’époque…

 

A plusieurs reprises dans ce dernier mouvement, le soliste se retrouve absolument seul au violon. C’est traditionnellement des moments de cadences, l’occasion pour lui ou elle de montrer sa virtuosité. Le tempo y est souvent rubato, et le violoniste peut se permettre d’ajouter à son jeu une part d’improvisation, comme c’est le cas ici. L’orchestre ponctue ses interventions avant une réexposition du thème du début…

 

Pour le plaisir, et pour prolonger la notion de cadence dans un concerto, faisons un petit pas de côté avec un extrait vidéo du Concerto pour violon n°2 du même Félix Mendelssohn (bien plus célèbre que le n°3!), avec Yehudi Menuhin au violon…

Bibliographie - Webographie

Bibliographie

DERMONCOURT Bertrand (sous la direction de), Tout Bach, Robert Laffont, 2009

CANTAGREL Gilles, J.S Bach, L’œuvre instrumentale, Buchet Chastel, 2018

CANTAGREL Gilles, Sur les traces de J.S Bach, Buchet Chastel, 2021

OLIVIER Philippe, Felix Mendelssohn, Hermann musique, 2008

MENDELSSOHN Félix, J’ai fait en conscience mon métier de voyageur, Lettres européennes, Le passeur Editeur, 2022

VIGNAL Marc, Dictionnaire de la musique, Larousse, 1999

 

Webographie

https://edutheque.philharmoniedeparis.fr/0038240-biographie-johann-sebastian-bach.aspx

http://passee-des-arts.over-blog.com/article-36020676.html

https://edutheque.philharmoniedeparis.fr/0038902-biographie-de-felix-mendelssohn-bartholdy.aspx